Bonnes résolutions obligent, on reprend la quête du dépilage avec aujourd’hui un jeu sorti en toute fin de la Gamecube : *Chibi-Robo!* Véritable OVNI de son époque, il s'inscrit bien dans la liste des jeux japonais étranges et loufoques édités à l’époque (pensez à *Katamari Damacy*). Mais que se cache-t-il derrière la bouille inexpressive de ce petit bonhomme de métal à la passion ménagère ?
Fiche Technique
- Genre : Aventure / Simulateur de ménage
- Titre original : Chibi-Robo!
- Date de sortie : [JP] 23/06/2005 - [EU] 26/05/2006
- Développeur : Skip
- Editeur : Nintendo
- Plateforme : GameCube, Wii
- Directeur : Kenichi Nishi / Hiroshi Moriyama
Contexte de jeu
- Jeux du même genre déjà faits : hum… Pikmin (NGC) ?
- Attente : Moyenne.
- Notes : Jeu terminé, pas mal de quêtes annexes accomplies, mais pas fait à 100%.
Unstack Story
C’est au hasard des bacs d’occasions d’un magasin de jeux vidéo que je suis tombé, à la fin des années 2000, sur le jeu qui nous intéresse aujourd’hui. Edité par Nintendo, exclusivité de la Gamecube (deux arguments qui “triggerent” généralement un NSexs), la fée du ménage en titane et son univers ont vite rejoint ma collection, devenant, à mon insu, la pièce la plus précieuse que je possède ! Une telle rareté s’explique sans doute par des ventes assez limitées, malgré un petit succès d’estime qui le met dans la case des perles inconnues du roster Nintendo. Et si l’on ajoute à cela un gameplay rarement vu et un univers humoristique typiquement japonais, on obtient une expérience à part, pas exempte de défauts, mais amusante et rafraîchissante.
Bon on ne peut pas continuer plus longtemps sans parler de ce qu’est le jeu, de ses mécaniques et de comment elles s’articulent entre elles. Chibi-Robo! nous mets dans la peau d’un petit robot éponyme, pas plus grand que la main, qui est acheté par Monsieur Sanderson en tant que cadeau pour sa fille Jenny, cette dernière se prenant pour une grenouille depuis plusieurs années. Mais cela n’est pas au goût de Madame Sanderson, qui décide de faire dormir son chômeur de mari sur le canapé, l’accusant à raison de passer son temps à dépenser le peu d’argent qu’il leur reste dans des jouets hors de prix (nous y compris) au lieu de chercher du travail. À ces trois personnages s’ajoute le chien Tao, pour finir de constituer une version dysfonctionnelle et excentrique du cliché de la famille américaine des années 60s, dans un farce cartoonesque, surjouée et absurde.
Alors que le ménage conjugale part à la dérive, notre mission sera de rendre toute la maisonnée la plus heureuse possible. Et pour cela, quoi de mieux que de… ramasser leurs déchets ! En effet les Chibi-robos sont un nouveau modèle de droïdes miniatures spécialisés dans le nettoyage et l’entretien. Nous allons alors nous balader dans les différentes pièces de la maison Sanderson (d’abord juste le salon, puis la cuisine, les chambres, etc) afin de mettre en ordre tout ce qui ne va pas dans la vie de cette famille. Chacunes de nos actions seront récompensés par des points de bonheur qui nous permettront de nous hisser sur le classement des meilleurs Chibi-robos ! Outre les membres de la famille Sanderson, la maison est aussi peuplée de jouets qui, comme dans Toy Story, prennent vie quand les humains ne sont pas dans les alentours. On a ainsi une fresque de personnages bizarres, avec chacun leurs problèmes, qu’ils nous faudra régler pour amasser un maximum de points de bonheur.
La structure du jeu se rapproche ainsi énormément de celle d’un Point&Click. Chaque personnage rencontré nous demandera, directement ou non, d’accomplir différentes actions pour les rendre heureux. Leur ramener un objet, parler avec quelqu’un d’autre, nettoyer quelque chose, ou bien gagner un mini-jeu : voilà le type d’activités qui attend notre robot intrépide. Une trame principale nous permettra d’arriver à la fin du jeu, en répondant à certains personnages, mais elle sera, au rythme de notre exploration, traversée d’une multitude de micro-histoires, comme autant de quêtes annexes, donnant au final une aventure non-linéaire pleine de vie. On se retrouve régulièrement avec pleins de pistes de choses à faire pour faire avancer les intrigues, et l’amusement vient du fait de toutes les explorer, dans l’espoir d’en débloquer de nouvelles et de se rapprocher de notre but final. Tout cela peut être fait dans l’ordre que l’on souhaite, en fonction de notre intuition, de l’ordre dans lequel on visite les pièces de la maison, ou des fonctionnalités que nous aurons débloquées sur notre Chibi-robo, nous permettant ainsi de mettre de côté les énigmes sur lesquelles on bloque pour y revenir plus tard. On a véritablement l’impression d’être devant une boîte à jouets, avec l’envie d’appuyer d’appuyer partout pour voir ce qu’il va se passer, avec en plus le fantasme grisant de se balader dans des décors de la vie de tous les jours, rendus gigantesque par notre petite taille !
À cela, le jeu ajoute une mécanique très intéressante de doubles cycles. À l’instar d’un Pikmin, nous ne pouvons explorer la maison que pendant un temps donné (initialement dix minutes) avant de devoir retourner à notre station, alternant le jour et la nuit, avec chacun leurs évènements particuliers. De plus, notre petit Chibi-robo n’est que semi-autonome : nous disposons d’une batterie qui se vide pendant nos déplacements et nos actions, et il faudra souvent se brancher aux prises de la maison pour se recharger en électricité et continuer notre aventure. Ces deux cycles donnent du rythme, nous forçant à devoir planifier nos propres objectifs entre deux recharges, ainsi que sur l’ensemble de la journée. Et cela devient très vite addictif, quand on est à deux doigts de finir une quête, et que le timer de fin de journée nous renvoie à la station. On se prend au jeu à relancer une autre journée (ou nuitée) en se disant que dans le temps imparti, on fera telle et telle chose, équilibrant les tâches ménagères, répétables à l’infini, et celles faisant avancer les trames narratives, comme un chef de projet zélé devant une roadmap bicéphale.
Le contrecoup de ce genre de structure organique est que la narration peut paraître décousue, et que le jeu se finit brusquement. La mise en scène, elle, sent méchamment les années 2000s, avec des placements de caméra bateaux et un rythme assez plat. Pas étonnant pour un jeu de cet époque, mais quelque peu ennuyant avec un regard actuel, habitué à une réalisation plus maîtrisée. À côté de ça, le jeu surprend vraiment par la maturité des thèmes qu’il aborde. Tout en arborant une forme loufoque, proche du cartoon (notamment dans le son, chacune de nos actions étant accompagnée par des SFXs musicaux rigolos), il parle d’écologie, de dispute conjugale, d’éducation, de pression sociale ou de précarité. Cela est bien sûr abordé avec légèreté, mais laisse une sensation douce amère dans son propos, balançant entre la naïveté débordante et la satire parodique. Bon là, je vais peut-être un peu loin, tout reste très mignon et très cliché, cherchant surtout à créer des moments comiques. Mais plusieurs fois au fil de ma partie, j’ai été percuté par des prises de conscience sur la dureté de certaines situations si elles avaient été montrées dans un monde plus réaliste.
Chibi-Robo! est un jeu fort étonnant, assez unique dans sa structure de Point&Click 3D, nous offrant une aventure vivante et chaotique, où notre curiosité devient le moteur d’une folie ménagère offrant le bonheur au petit monde qui s’agite sur notre écran. Assez novateur pour son époque, il maîtrise avec justesse sa courbe de progression, offrant toujours de nouvelles possibilités et de nouveaux environnement à explorer. À condition d’accrocher à son univers excentrique et enfantin, parfois débile, il propose suffisamment de richesses pour en faire une des curiosités de la Gamecube, sur laquelle il vaut le coup de passer du temps.
Crédits screenshots : Playlist Youtube Chibi-Robo ! Let’s Play FR de NamaZu